Le prix de la blessure sportive

Saviez-vous que 75 % des sportifs de haut niveau français ont été contraints à un arrêt d’au moins une semaine en raison d’une blessure ? Et que 45 % d’entre eux ont cumulé plus de deux mois d’arrêt au cours des quatre années précédant les Jeux de Rio ? Les blessures sportives entraînent non seulement des interruptions prolongées, mais aussi des répercussions psychologiques et financières significatives.

Cet article est fait pour vous si, actuellement ou récemment vous avez été blessé à l’entrainement/compétition ou victime d’un accident de la route ou du quotidien. Il réunit toutes les contraintes psychiques et financières qui se jouent autour de la blessure. Vous découvrirez le cas concret de Léo sportif victime d’un accident de la route ; le prénom a été changé pour la confidentialité.

Tout au long de l’article, vous pourrez découvrir l’éclairage théorique et pratique de deux professionnelles du domaine : Maître Camélia Navarre-Alidor, Avocate en réparation du préjudice corporel et Cindy Laplace Préparatrice Mentale. 

Dans un premier temps, nous explorerons les aspects psychologiques liés à la prise en charge d’une blessure. Ensuite, dans un second temps, nous aborderons l’éclairage juridique, tout en mettant particulièrement l’accent sur la réparation du dommage corporel. Enfin, nous conclurons par une synthèse des conseils essentiels de ces deux professionnels pour mieux gérer la blessure et ses conséquences.

La blessure période délicate sur tous les aspects 

Pour commencer, la blessure est inhérente à la pratique sportive, il existe trois degrés de blessure ; la blessure grave qui nécessite plusieurs mois d’arrêt (niveau 1), la petite blessure qui impose des aménagements ou un arrêt limité et la non-blessure. Dans tous les cas, elle ralentit le processus de progression et de performance de la personne. Sur les aspects psychologiques, la blessure est souvent très difficile à vivre. Du fait qu’elle vienne stopper, limiter la pratique, le plaisir. En conséquence en impactant la performance elle génère chez le sportif des frustrations importantes.

Il faut dire qu’une blessure engendre une période de chamboulement au niveau des émotions, comme la colère, la tristesse et la peur se mêlent. La sportive ou le sportif se voit devoir redéfinir ses objectifs, passer à côté de compétition pour lesquelles ils se préparaient depuis des mois ou des années.

La préparation mentale comme levier de réathlétisation de la blessure. 

Le rôle du préparateur mental sera d’accompagner le sportif dans les étapes de gestion de sa blessure : blessure, diagnostic médical, rééducation et réathlétisation. Des étapes psychologiques comme le choc,  la dépression et l’acceptation sont souvent citées, mais suivant les personnalités et les ressources des athlètes ces étapes diffèrent. 

A savoir que, les entretiens réalisés par le préparateur mental vont mener plus facilement l’athlète à la  compréhension de sa blessure. Pour illustrer le propos, le conduire à une forme d’acceptation de la situation. Grâce à cela, l’athlète va pouvoir investir plus efficacement sa rééducation et sa réathlétisation afin de retrouver son niveau dans un délai correct. Parfois le contexte d’apparition (premier match, grande compétition, veille du tournoi) évoque l’expression sous-jacente de stress. Elle peut être aussi l’expression de traumatisme et il faudra orienter le suivi avec une psychologue compétent.

Éviter les liens entre stress et blessure 

Le lien entre le stress et la blessure est un modèle complexe connu que j’ai étudié dans le cadre de mon mémoire “ Stress injury model” d’Andersen et Williams en 1988.

Ce modèle explique les facteurs de prédispositions à un stress qui impacte nos habitudes et qui mènent plus facilement à la blessure. Par exemple, un joueur de sport collectif pour qui son rôle est peu clair (notamment dans le cas de changement de poste, ou quand les attentes diverses entre les siennes et celle de son staff) est plus à risque de se blesser qu’un autre. Pour éviter de subir ce “Stress Injury model”, un accompagnement régulier en préparation mentale, une hygiène de vie sont indispensables. (Si vous souhaitez en savoir plus, un article est disponible en bas de page). 

Concrètement, la préparation mentale pour mieux vivre une blessure 

La préparation mentale est l’entrainement mental qui permet à l’athlète de maintenir sa confiance, préserver sa motivation et son engagement dans la période où il est blessé tout en conservant sa place et son niveau. Quelques outils bien connus, comme l’imagerie mentale engage le pratiquant dans les protocoles de soin. Pour illustrer ce propos, dans les blessures longues pour les LCA, l’imagerie permet de gagner en degrés de flexion et d’extension, sur les déchirures  de stade 2 ou stade 3 (déchirure complète de la fibre musculaire) ou d’immobilisation permettent de préserver la  masse maigre et limiter la fonte musculaire. Les protocoles d’imagerie mentale évoluent tout au long du processus de guérison et de réathlétisation en fonction du besoin de la sportive. 

Réinvestir la blessure autrement peut être également une solution : parfois elle peut être l’occasion de s’octroyer plus de temps en famille, entre amis, de finaliser un projet d’étude ou professionnel. Créer une opportunité en améliorant votre visibilité médiatique et sa présence auprès des partenaires qui vous suivent. Attention, entre l’envie de réinvestir sa blessure et le faire il y a un monde : celui du psychisme d’où l’intérêt d’être accompagné. 

L’entraînement mental doit s’assurer de l’adaptation des objectifs et de la poursuite de la progression, qu’elle soit technique, tactique, physique ou psychologique de la sportive. Le corps est à l’arrêt, mais le cerveau non. Par conséquent, cette période est propice à travailler sur d’autres aspects :  les prises de décisions dans le sport concerné, les règles, l’artistique, le cardio ou autre, une langue étrangère dans les championnats internationaux. 

La blessure un réel stress : une insécurité financière

Finalement, depuis 11ans que j’accompagne les sportifs blessés, je constate que malgré le travail psychologique réalisé ; il reste souvent aux athlètes un stress sur lequel nous n’avions aucun contrôle direct : le stress financier ! 

Au-delà, de devoir gérer sa blessure et la période de rééducation et de réathlétisation, elle entraîne parfois une inquiétude vis-à vis des sponsors. “Ils vont me lâcher” “Je serais moins performant du coup on va m’oublier”. “J’ai tout perdu”  “J’ai vu des sportives et sportifs devoir quitter leur appartement pour retourner chez leurs parents” pour des raisons financières. En conséquence, les coûts annexes sont relayés à plus tard (notamment les thérapies ) par faute de moyen dû à la baisse de revenus ou à l’insécurité financière. C’est pourquoi, j’ai souhaité avoir l’éclairage d’une avocate spécialisée sur le sujet pour mieux préserver les sportives et sportifs blessés. 

La réparation du préjudice corporel des sportifs : anticipation, indemnisation et solutions financières.

De toute évidence, la pratique sportive, qu’elle soit amateur ou professionnelle, expose les athlètes à des risques de blessures pouvant impacter durablement leur quotidien sur le plan financier. La réparation du préjudice corporel des sportifs ne se limite pas aux soins médicaux. Elle englobe également les pertes de revenus, la reconversion éventuelle et les conséquences économiques d’un accident. 

1. L’impact financier d’une blessure 

L’accident corporel d’un sportif professionnel ou amateur ; que ce soit un accident dans le cadre de sa pratique sportive, un accident de la vie quotidienne ou un accident de la route peut avoir des répercussions financières considérables. Les conséquences varient selon la gravité de la blessure et la durée d’indisponibilité :

• Frais médicaux et rééducation : Même en bénéficiant de la Sécurité sociale et d’une mutuelle, certains coûts restent à la charge du sportif. Notamment les soins spécialisés (kinésithérapie, ostéopathie, dépassements d’honoraires), les équipements spécifiques et les traitements post-opératoires.
• Pertes de revenus : Un sportif blessé qui subit une interruption de ses sources de revenus peut voir sa stabilité financière affectée. 
• Conséquences sur la carrière : Une blessure grave peut contraindre à une reconversion prématurée, avec un impact sur les opportunités professionnelles et le niveau de vie futur.
• Charges personnelles et familiales : En l’absence de revenus suffisants, les charges fixes (loyer, crédit immobilier, factures) peuvent devenir difficiles à assumer.

Ainsi, l’anticipation et la protection financière doivent être une priorité pour tout sportif.

2. Anticiper et se protéger avec une assurance adaptée

La meilleure manière de gérer l’impact d’un accident sportif est d’anticiper en souscrivant à une couverture d’assurance complète. Plusieurs solutions existent pour sécuriser l’avenir financier des sportifs en cas de blessure :

• L’assurance individuelle accident : Elle permet de couvrir les frais médicaux non pris en charge et d’obtenir une indemnisation en cas d’incapacité temporaire ou permanente.
• L’assurance perte de revenus : Indispensable pour les sportifs professionnels, elle compense la perte de salaire due à l’arrêt de l’activité.
• Les contrats spécifiques des fédérations et clubs : Certaines licences incluent une assurance obligatoire, mais elle reste souvent insuffisante pour couvrir l’ensemble des préjudices.
• L’assurance prévoyance et invalidité : Un contrat spécifique peut garantir un capital ou une rente en cas d’incapacité définitive à exercer son métier.

Pour être efficace, l’assurance doit être personnalisée selon le niveau de pratique et le statut du sportif. Une étude attentive des garanties, plafonds d’indemnisation et exclusions de contrat est indispensable.

3. Pallier les pertes économiques et préparer l’après-blessure

Lorsqu’un accident survient et que les conséquences financières deviennent une réalité, plusieurs solutions peuvent être envisagées :

• Faire valoir ses droits à indemnisation. En cas d’accident causé par un tiers (adversaire, organisateur, club), la responsabilité civile peut être engagée pour obtenir une réparation intégrale du préjudice corporel. L’intervention d’un avocat en droit du dommage corporel est souvent nécessaire pour maximiser l’indemnisation.

Prenons le cas de l’histoire de Léo, 21 ans, rugbyman amateur.